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04/12/2013

"Ce qui divise les Français est plus fort que ce qui les rassemble"

Constat  (du Nouvel Observateur) qui en dit long :  crise,france,libéralisme


 

 

« Autoportrait d'une France en déclin » : c'est le dossier du Nouvel Observateur cette semaine. Il en ressort que : 94 % des Français se déclarent attachés à la France ; 88 % accusent la droite et la gauche de « ne pas se préoccuper des gens » ; 73 % voient leur pays comme « en déclin » ; 74 % disent que les inégalités sociales se sont « aggravées » depuis dix ans ; 57 % déclarent que « ce qui divise les Français est plus fort que ce qui les rassemble » ; 66 % pensent que la crise économique est « sans précédent » et qu'il faut donc « réformer en profondeur ». Chiffres significatifs ! Mes confrères de la presse commerciale feraient bien de les relire avec attention. Ces affirmations des Français disqualifient les slogans politico-médiatiques...

 

> 94 % se déclarent « attachés à la France » ? Ils y ont du mérite, baignant depuis plusieurs décennies dans un culte médiatique de l'hyper-individualisme.

 

> La très grande majorité (88 %) constate que le club des partis et des médias n'est pas dans le monde réel. Ceci n'a rien à voir avec de « l'antiparlementarisme » (comme le prétendent des zombis acharnés à confondre 2013 et 1934), mais tout à voir avec ce qui nous est imposé depuis le putsch ultralibéral des années 1990 : un système d'« experts » surplombant les institutions démocratiques. (Et reformatant la société par la dérégulation tous azimuts – c'est l'idéologie du marché total instrumentalisant un magma d'individus).

 

> 73 % voient la France « en déclin ». Cette idée faisait encore rire les libéraux il y a deux ou trois ans : ils la qualifiaient de « déclinisme »... Aujourd'hui ils rient moins (craignant que l'impression de déclin généralisée fasse « monter le FN ») [1]. Mais ils refusent de faire le total des ingrédients du déclin : cette addition mènerait à un diagnostic dont ils ne veulent à aucun prix.

 

> 74 % constatent l'aggravation des « inégalités sociales ». Depuis vingt à trente ans le système économique est vampirisé par la finance spéculative [2] qui a imposé ses usages, dilatant les hauts revenus jusqu'à des proportions tératologiques, et amputant les bas revenus – jusqu'à la suppression des emplois –  au nom de la compétitivité.

 

> 57 % constatent que « ce qui divise les Français est plus fort que ce qui les rassemble ». Les radios s'en étonnaient ce matin, mais quoi de surprenant ? Depuis le putsch des années 1990, le marketing de « niches » a remplacé la notion de bien commun. Tout a été fait pour considérer la France, non plus comme un ensemble doté d'un destin (à assurer politiquement pour l'avenir), mais comme un assemblage aléatoire de « communautés » en tous genres, segments de marché pour les promoteurs de moeurs aussi renouvelables que les smartphones [3]. Cette vision des choses a été imposée par le business à la classe politique... D'où le chaos mental actuel, que les libéraux de droite et d'extrême droite déplorent mais dont ils refusent de discerner la cause. (Bien que le pape mette de plus en plus souvent la question sur le tapis).

 

> 66 % pensent que la crise économique est « sans précédent ». Là aussi ils ont du mérite, au rebours du discours officiel omniprésent... (« Tout ça n'est qu'une affaire de cycles et la croissance reviendra ; que le salarié licencié se console en contemplant les Règles d'or ! Lao-Tseu l'a dit, il faut trouver la voie »).

 

> Les mêmes 66 % disent qu'il faut « réformer la France en profondeur », puisque « la crise est sans précédent ». S'agissant d'une crise de fond qui annonce l'impasse du productivisme mondialisé et la faillite frauduleuse du libéralisme, la réforme nécessaire – mieux vaudrait dire : la révolution – n'a rien à voir avec les revendications des productivistes en bonnet rouge. Plutôt que de verser un milliard d'euros dans le trou sans fond du productivisme agro-alimentaire breton (déguisé en nationalisme du même métal), l'Etat devrait réfléchir à l'urgence de réorienter l'agriculture : et pas seulement elle, et pas seulement en Bretagne mais en France [4]. Sinon il arrivera à l'agriculture mondialisée la même chose qu'à la sidérurgie, et pour des raisons comparables.

 

Le sondage du Nouvel Observateur en dit long sur l'état d'esprit qui naît chez le Français moyen. Malheur à ceux qui en nieront la portée. Malheur aussi à ceux qui tenteront de le réduire à leurs propres idées fixes...

 

 

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[1] Laissons par ailleurs les fabulistes dire que les choses allaient mieux sous saint Louis. La question n'est pas là : l'émiettement de la société contemporaine ne se résume pas à un problème « d'identité nationale »... (Et il faudrait arriver à définir cette « identité » : ambition philosophique qui dépasse la compétence des historiens).

[2]  Des porte-parole du système persistent à nier cela, et à nous raconter à la radio les Contes bleus de ma mère l'Oye. Ainsi l'histoire du haricot magique, ou plus exactement« du Brésilien qui a perdu toute sa fortune car les marchés sont la justice immanente ». Ou mieux encore (blasphème entendu récemment), cette idée que « la Main Invisible du Marché est une notion chrétienne car elle s'apparente au rôle de Dieu le Père, et appelle en équilibrage le Caritatif, image de Dieu le Fils ». L'intervenant n'a rien dit du Saint-Esprit, absent de ce débat.

[3] Nouveautés comportementales dont l'extension constante a précisément, parmi ses objectifs commerciaux, celui d'élargir sans limites les applications des smartphones...

[4] Frontière sur la ligne Fougères-Clisson, pour faire plaisir au maire de Carhaix. (Ha mallozh ruz d'ar C'hallaoued !)

 

Commentaires

GOOGLE

> Manque un lien sur l'article du Nouvel Observateur s'il se trouve sur internet

JFC

[ PP à JFC - accès facile par Google : http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20131204.OBS8014/75-des-francais-jugent-la-france-en-declin.html )

réponse au commentaire

Écrit par : J-F Chaudron / | 04/12/2013

EN VAIN

> Et en matière de lutte antilibérale, on cherchera en vain un contrepoison.

"Le régulateur boursier chinois vient d'annoncer une refonte du système par lequel les entreprises sont autorisées à se coter sur la bourse de Shanghai, promettant par la même occasion la fin du blocage mis en place en novembre 2012 sur ce marché. La China securities regulatory commission (CSRC) a dévoilé son grand projet qui consiste à passer d'un système dans lequel le régulateur vérifiait la solidité d'une entreprise avant de l'autoriser à se coter à un mécanisme par lequel une entreprise aspirant à la cotation devra simplement présenter les éléments comptables requis, laissant le marché jauger de sa qualité."

http://pro.orange.fr/sinformer/patrimoine_et_vie_privee/bourse/cette-nuit-en-asie-la-bourse-chinoise-fait-un-bond-en-avant.html
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Écrit par : Christian / | 04/12/2013

SERAIENT-ILS PRÊTS ?

> Le problème de ce genre de statistiques, c'est qu'on peut les instrumentaliser dans tous les sens. Les français veulent un changement profond, ils ont bien raison; mais seraient-ils prêts à véritablement quitter la société de consommation, à abandonner leurs smartphones et leurs télés, à désactiver internet, à quitter l'union européenne, à interdire la pub, à fermer la grande distribution, à revenir à l'agriculture, à l'artisanat?

Je crois que cette société nous rend malheureux, mais nous avachit, et que nous aurons beaucoup de mal à nous passer des divers types de "soma" qu'elle nous propose : divertissement, consommation à outrance, voyage, etc. Je vois bien dans ma vie quelle quantité d'efforts demande chaque acte de simplification... Même si au final, on se rapproche un peu plus du bonheur à chaque fois.
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Écrit par : Gilles Texier / | 04/12/2013

AUSSI

> Il y a eu aussi des Bonnets rouges anti-libéraux, et même des anti-européistes

http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/une-autre-vision-des-bonnets-143720

Oui, il y a un rejet général du système supranational, libéral et libertaire. la faiblesse de ce rejet est que chacun n'en voient que l'aspect qui le dérange le plus sans comprendre les liens avec les autres. Ainsi les protestations patriotiques, sociale et morales ne se rejoignent pas encore. Mais le jour ou le soufre, le charbon de bois et le salpêtre vont se combiner....
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Écrit par : Pierre Huet / | 04/12/2013

TORDU

> « la Main Invisible du Marché est une notion chrétienne car elle s'apparente au rôle de Dieu le Père, et appelle en équilibrage le Caritatif, image de Dieu le Fils »
Je ne sais où vous avez entendu ça, mais peut-être était-ce au même endroit que moi. Si j'ai bon souvenir il y était toutefois un peu question de l'Esprit Saint quoi que fort peu effectivement. Mais également d'un ancien dirigeant d'une grande institution internationale réputé pour son libéralisme (quoi qu'il s'en défende) -ladite institution elle-même connue pour son libéralisme.

Moi, ça m'a purement et simplement écœuré. Encore que cela ne m'ait pas surpris eu égard au lieu où ces propos ont été prononcés.

Je ne me fais pas beaucoup d’illusions. C'est comme ça, le libéralisme a tout infesté à un point qu'il est difficile d'en mesurer l'étendue. C'est pour ça que j'ai du mal à croire que les lignes bougent. J'aimerais vraiment que cela soit le cas, mais au vu des propos en question, prononcés après la parution d'Evangelii Gaudium, là où ils ont été prononcés, j'ai du mal à le croire.

L'esprit humain est tellement tordu qu'il se trouvera toujours des gens pour trouver des arguties complètement abracadabrantesques pour justifier tout et n'importe quoi, et pour admettre sans sourciller les contradictions les plus insoutenables sur le plan rationnel.
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Écrit par : ND / | 04/12/2013

YVES MEAUDRE

> Encore une fois, à lire et à relire sur LP (site où décidément on peut lire…de tout), cet extraordinaire article de M. Meaudre :

http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Solidarnosc-et-le-printemps-des-consciences-francaises2

Je suis d'accord avec lui : ce que veulent (consciemment ou non) les Français, c'est un Prince qui AIME la France et tout ceux qui y vivent. Et qui soit prêt à se sacrifier pour eux. Est-ce trop demander ? Il faut croire que oui.
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Écrit par : Feld / | 05/12/2013

EXPLOSIF

> Il ne faut pas s'étonner que l'état d'esprit soit explosif:

http://www.economiematin.fr/eco-digest/item/6759-faillite-entreprise-pme-france-crise-reprise

Il ne faut pas s'étonner non plus que patrons et salariés manifestent ensemble même si ce n'est pas contre les bonnes cibles. Dans un bateau qui se délabre, la lutte des classes n'a plus sa place entre les différents grades de l'équipage car c'est ensemble que tous risquent de couler. Pire, elle masque les vraies causes du danger.

Beaucoup ne savent pas discerner quel est l'armateur fautif du délabrement. Aidons les à y voir clair.
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Écrit par : Pierre Huet / | 06/12/2013

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